Quelques 180.000 chômeurs belges seront virés du chômage après deux ans et paupérisés en 2026 et ce n’est qu’un début. Selon l’Office national de l’emploi (ONEM), la Belgique compte 292.371 chômeurs complets indemnisés (+1,8% par rapport à juin 2024) en juin 2025. Les chômeurs comptant deux ans de chômage et plus sont au nombre de 131.111 en juin 2025 (54.602 femmes), selon les statistiques interactives de l’ONEM, dont 90.735 en Wallonie (la Communauté germanophone compris) et à Bruxelles, dont 38.887 sont des femmes. Cette réforme vise clairement les chômeurs du sud du pays, réputé le paradis de l’assistanat pour les politiciens comme les citoyens flamingants. Pour le Voka, le patronat flamand, la réserve de chômeurs wallons doit servir à combler les besoins en main-d’oeuvre de la Flandre. (Le Soir : 25/08/2025)

Toute compassion pour les privés d’emploi a majoritairement disparu dans notre société. La campagne électorale gagnante des partis de droite extrémistes a surfé sur des clichés éculés, des fake news jamais étayées par des chiffres ni des études scientifiques sérieuses et fiables. Comme aux USA, l’inculture politique croissante voire l’anti-politique a gagné en popularité chez nous. L’absence d’empathie dans la société et, avec cynisme, dans la direction des affaires publiques constitue un véritable danger démocratique.
« Certains auteurs se sont focalisés sur les mécanismes émotionnels : l’observateur qui entre en empathie avec autrui ressent lui-même une émotion (il existe une contagion émotionnelle entre les deux individus) [2]. D’autres auteurs se sont focalisés, comme Piaget, sur le processus cognitif de décentration : pour comprendre les émotions d’autrui, l’observateur « se met à sa place », il adopte son point de vue [3]. » (Narme, P., Mouras, H., Loas, G., Krystkowiak, P., Roussel, M., Boucart, M. et Godefroy, O. (2010). Vers une approche neuropsychologique de l’empathie. Revue de neuropsychologie, 2(4), 292-298. https://doi.org/10.1684/nrp.2010.0098)
A l’heure de la polarisation exacerbée des débats sur les réseaux sociaux, il est devenu impossible de raisonner rationnellement face à la rage et l’hostilité qui se déversent en ligne. Les débats argumentés avec des faits n’existent plus entre adversaires aux points de vue différent. Les fake news ont contaminé intellectuellement les médias de masse aussi, ce qui nuit à leur crédibilité et à toute possibilité de compter sur du journalisme déontologiquement correct. N’importe quel mensonge s’érige en opinion indiscutable.
L’opposition entre travailleur et chômeur, alors qu’il s’agit des deux facettes de la même médaille, permet au patronat de régner en maître, jouant la division des intérêts, car cela contribue à l’extinction de la solidarité entre les citoyens de la même classe sociale avec laquelle il ‘n’y a plus d’identification ni de sentiment d’appartenance à la même culture de classe. Ce lissage sociologique opéré par le libéralisme et l’individualisme forcené a transformé le citoyen en consommateur, individualisant ainsi le ressenti des problèmes et la recherche d’un sauveur plutôt qu’une culture du combat collectif. Seule une minorité de citoyens et de syndicalistes cultivés politiquement et conscients des vrais enjeux des politiques antisociales se mobilisent alors que les citoyens concernés et directement impactés sont légion mais ne se révoltent pas et focalisent leur colère contre les victimes plutôt que contre les agresseurs : les super riches, le patronat et les politiciens des droites extrémistes, leurs larbins et bra-armé.
Le MR et Les Engagés (partis de la majorité au gouvernement Arizona) ont vendu une hausse de pouvoir d’achat de respectivement 500 euros/450 euros nets de salaire contre la tête des chômeurs aux citoyens, désabusés et appauvris par les précédents gouvernements, c’est passé comme une lettre à la poste. La réalité sera toute autre avec la réforme de l’impôt des personnes physiques, l’Arizona garantira à peine plus de 90 euros en plus par mois (source L’Echo 27/07/2025) aux salariés paupérisés qui ont voté pour eux et ce seulement à partir de 2029.

Les arguments populistes de l’Arizona confortent un peuple ignorant voire méchant dans ses préjugés, vieux comme le monde : chômeurs pourris vautrés dans l’assistanat, chômeurs incompétents qui refusent de se former, chômeurs refusant les emplois en pénurie, chômeurs rétifs au travail parce que les allocations paient plus qu’un salaire, chômage payé par la collectivité ou « les gens » sont autant de contre-vérités qui doivent être contrecarrées, notamment pour pouvoir étayer un recours contre la loi-programme devant la Cour Constitutionnelle.
L’objectif est de se battre en utilisant ce qu’il reste d’État de droit et d’indépendance des pouvoirs (la Justice contre l’Exécutif, le gouvernement) pour que cette régression sociale qui viole le standstill ne puisse avoir lieu. En effet, le standstill lié à l’article 23 de la Constitution belge est un rempart contre les régressions des droits humains disproportionnées et dénuées d’intérêt général de même que de justifications solides. (NDLR votre serviteur écrit et suit l’actualité du chômage belge et européen depuis 1992, elle a elle-même été chômeuse de longue durée ce qu’elle raconte dans journalduneprofiteuse.be et elle a gagné son recours devant la Cour du travail de Liège contre la dégressivité accrue des allocations de chômage instaurée par la gouvernement Di Rupo, son réquisitoire gagnant basé sur le standstill devrait en inspirer d’autres).
Art. 23
Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine.
A cette fin, la loi, le décret ou la règle visée à l’article 134 garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice.
Ces droits comprennent notamment :
1° le droit au travail et au libre choix d’une activité professionnelle dans le cadre d’une politique générale de l’emploi, visant entre autres à assurer un niveau d’emploi aussi stable et élevé que possible, le droit à des conditions de travail et à une rémunération équitables, ainsi que le droit d’information, de consultation et de négociation collective;
2° le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l’aide sociale, médicale et juridique;
3° le droit à un logement décent;
4° le droit à la protection d’un environnement sain;
5° le droit à l’épanouissement culturel et social ;
6° le droit aux prestations familiales.
La litanie de mensonges qui sert de contenu au gouvernement Arizona dans son accord de gouvernement pour justifier les violations des droits humains inscrits dans la Constitution doit être contredite par les faits.
C’est simple, l’impact des mesures est systématiquement le contraire de ce qui est annoncé dans la propagande des partis politiques surtout celle du MR car elle est entre les mains exclusives de son président, Trumpiste d’adoption, Georges-Louis Bouchez.
Antisocial à tous les étages : droits sociaux et droits du travail éliminés

Les droites extrémistes (N-VA, MR, Les Engagés ,CD&V) au sein du gouvernement Arizona (N-VA, CD&V,MR, Les Engagés, Vooruit) s’attaquent aux chômeurs/travailleurs et démantèlent la sécurité sociale dans toutes ses protections, avec dans leur collimateur les fonctionnaires en particulier : les pensions (un ministère au main de la N-VA parti de la droite nationaliste flamande) gravement mises à mal, pénaliseront encore plus les femmes, verront les fonctionnaires perdent beaucoup d’argent. Un fonctionnaire, professeur émérite de droit Constitutionnel vient d’ailleurs d’intenter un recours en annulation de la Loi-Programme volet pension. Ce n’est qu’un début. Les syndicats (CSC, FGTB, CGSLB) introduiront aussi un recours en annulation et pousseront les chômeurs à poser des questions préjudicielles à la Cour Constitutionnelle via les Tribunaux du travail de leur domicile.
La version de la réforme du chômage définitive, votée à l’arrachée, contient des objectifs officiels contradictoires avec leurs justifications, toutes réfutables, et met à sac le droit à la sécurité sociale. Elle revient surtout sur le pacte scellé entre patrons et syndicats en 1944, au moment de la création de la sécurité sociale, qui se voulait une réelle protection des travailleurs avec le but avoué de les sortir de la misère noire qu’ils connaissaient (source le rapport au Régent Au Moniteur du 30 décembre 1944). Aujourd’hui, les partis politiques francophones au pouvoir nient avec outrecuidance la misère qu’ils créent en Wallonie et à Bruxelles. Ils justifient toutes les décisions prises par l’argument budgétaire alors qu’ils n’ont pas pris la peine de demander aux plus riches de contribuer. Ils n’ont joué que sur les dépenses en réalisant un véritable saccage des droits sociaux, des droits du travail et des services publics. Ce déséquilibre entre ceux qui contribuent à boucher soi-disant les trous de la dette pourra être un argument pour attaquer la loi devant la Cour Constitutionnelle.

La réforme du chômage est intégrée à une loi-programme votée le 18 juillet 2025 après moult chantages entre les membres du gouvernement : Vooruit (socialistes flamands relativement à droite) a conditionné son vote à l’introduction d’une taxe sur les plus-values (le MR était contre et a réussi à diluer la mesure afin qu’elle épargne les gros portefeuilles) ; Les Engagés (ex-CDh) ont, eux, conditionné leur vote à l’augmentation de l’enveloppe financière allouée aux CPAS des communes qui devront gérer l’afflux de chômeurs exclus après deux ans. Pourtant beaucoup de chômeurs exclus n’entreront pas dans les conditions drastiques du droit à l’intégration sociale (RIS) des CPAS que la majorité a pris soin de revoir et en a durci les conditions d’accès en élargissant les revenus des membres du ménage pris en compte pour le calcul des revenus du paupérisé. Cela conduira à un appauvrissement conséquent des familles qui échapperont au revenu résiduel qu’est le revenu d’intégration sociale. En gros, la majorité des droites extrémistes s’est arrangée pour mettre un maximum de famille sur le carreau. La Loi-Programme a été votée majorité contre opposition sauf le VLD qui s’est abstenu (source L’Echo).
Cette loi-programme vise bien plus que la sécurité sociale, elle attaque les droits du travail conquis durant tout le XXème siècle. C’est un vaste programme du gouvernement Arizona visant les plus larges régressions sociales jamais implémentées depuis la loi sur le droit au repos du dimanche (loi du 17 juillet 1905) qui est remis en cause par la majorité en levant tout bonnement l’interdiction du travail du dimanche. L’obligation du contrat d’emploi d’un tiers temps minimum saute aussi. L’instauration de la journée de huit heures et la semaine de quarante-huit heures date de la loi du 14 juin 1921. L’Arizona vient justement de réintroduire la semaine de 48 heures et d’augmenter à 360 heures le nombre d’heures supplémentaires « volontaires ». Les travailleurs sous pression refuseront difficilement de travailler plus pour gagner plus (sic) si l’employeur l’exige.
La destruction des conquêtes sociales du monde du travail du début du XXème siècle traduit une volonté du gouvernement Arizona de remonter le temps jusqu’au niveau de non droit du travail et de l’absence totale de protection sociale du XIXème siècle. Les travailleurs d’alors n’étaient pas loin d’être des esclaves.
« Quelle est l’importance de la législation sociale en Belgique au XIX e siècle ? La réponse est très simple : elle est nulle…ou presque. Que ce soit sous le régime hollandais (1815-1830) ou après son indépendance, le territoire belge, deuxième après l’Angleterre à entamer la révolution industrielle (Verviers, 1799 ; Gand, 1800), constitue un havre de libéralisme hostile à toute intervention de l’État en matière de réglementation du travail. Issu de la bourgeoisie, le pouvoir politique en place, catholique et/ou libéral, sert avant tout les intérêts de la finance et du capitalisme industriel, avec lesquels il entretient des liens étroits. Un des principaux arguments brandis contre l’interventionnisme étatique est celui de la « liberté du travail » : il sous-entend qu’un contrat de travail ne regarde en définitive que l’employeur (détenant le capital et en demande de main-d’œuvre) et celui qu’il emploie (l’ouvrier qui offre « librement » sa force de travail contre une rémunération). » (source Analyse de L’IHOES No 159 – 20/10/2016 – Lionel Vanvelthem – Histoire du temps de travail en Belgique 1ère partie – Le temps de travail en Belgique durant le « long XIXe siècle » (1800-1914))
La société a changé depuis l’épisode du Covid-19, beaucoup de travailleurs ont eu le courage de quitter les secteurs où les boulots n’étaient pas satisfaisants pour eux. Ces jobs sont donc en pénurie aujourd’hui. Désormais l’exigence d’un équilibre vie privée et vie professionnelle est devenue une valeur pour le travailleur.
L’Arizona, c’est le retour de bâton après cette parenthèse de « mindfulness » du monde du travail en confinement et remise à plat de ses priorités dans la vie. Ce sera le travail à tout prix désormais, toutes les barrières empêchant les patrons d’avoir de bons esclaves étant tombées (le travail de nuit qui commence à être payé en supplément à minuit au lieu de 20 heures fera faire 45 millions d’économie au patronat (source L’Echo), le travail du dimanche autorisé désormais, l’étendue des heures d’ouverture des magasins allongée jusqu’à 21 heures, les heures supplémentaires « volontaires » – sic – augmentées, les heures autorisées annuellement des jobs étudiants accrues, les chômeurs obligés d’accepter un job « convenable » à 90% du salaire selon un obscure calcul qui inclut les allocations familiales, etc.).
Vider les caisses de l’État et de la sécurité sociale pour donner aux entreprises plus de profit, c’est le pari tenu de l’Arizona dans sa loi-programme.
Chose étrange et pénétrante, la réforme du chômage permet à des non-cotisants à la sécurité sociale secteur chômage, les indépendants, de faire reconnaître leur période d’activité pour le droit au chômage limité dans le temps. Les indépendants se sont déjà vu octroyer un droit passerelle sorte de droit au chômage sans cotisation pour les indépendants en échec avec leur business et cela avant le Covid-19. Ce droit passerelle a été immédiatement individualisé : seuls un taux chef de ménage et isolé sont prévus.
Pour les allocations sociales, la gauche élargie réclame l’individualisation des droits, la fin du statut de cohabitant, depuis des décennies sans succès. C’était amené par la gauche (PS, Ecolo) dans le gouvernement précédent mais la droite, dont le MR, a toujours bloqué. En effet, l’individualisation des droits sortirait nombre de famille de la misère crapuleuse que crée la faiblesse des allocations de chômage, quasi toutes sous le seuil de pauvreté. D’où pensez-vous que viennent les enfants pauvres dont la RTBF Vivacité fait ses choux gras chaque année, la version « povertyporn » du service public, « Viva For Life »?
Au contraire, l’Arizona en élargissant les revenus pris en compte dans le calcul du droit à l’intégration sociale des CPAS va plonger plus de familles dans la misère car ils n’auront pas accès au RIS qui est un revenu résiduaire (après déduction de tous les revenus y compris l’épargne pour déterminer l’état de « besoin ») contrairement au droit au chômage basé sur le seul revenu du chômeur, son salaire brut (avec un montant plafonné désormais à 2402 euros mensuels). Les CPAS trouvaient déjà le moyen de faire payer les parents pour les enfants et inversément. Cela ne sera plus nécessaire si ni parents ni enfants ne peuvent plus prétendre à l’aide du CPAS.
Un océan de misère en Wallonie et à Bruxelles

Vague 5 : fin du droit entre le 1er juillet 2026 et le 1er juillet 2027
Les chômeurs se situant dans la 1re période d’indemnisation avec un passé professionnel de moins de 5 ans. En fonction du passé professionnel, le droit aux allocations prend fin entre le 1er juillet 2026 et le 1er juillet 2027.
Vague 6 : fin du droit au 1er juillet 2027
Les chômeurs se situant dans la 1re période d’indemnisation avec un passé professionnel d’au moins 5 ans.
Exceptions : chômeurs pour lesquels la limitation dans le temps ne sera pas d’application
- Les demandeurs d’emploi avec une allocation de sauvegarde ;
- Les demandeurs d’emploi avec une allocation du travail des arts ou les anciens travailleurs des arts qui sont concernés par le filet de sécurité ;
- Les travailleurs des ports, les pêcheurs de mer, les débardeurs et les trieurs de poissons reconnus ;
- Les demandeurs d’emploi qui relèvent du régime de chômage avec complément d’entreprise (RCC) ;
- Les demandeurs d’emploi âgés de plus de 55 ans avec un passé professionnel de plus de 30 ans. Le passé professionnel requis sera relevé d’un an chaque année à partir de 2026, pour atteindre une condition de 35 ans de passé professionnel en 2030 ;
- Les travailleurs en situation de handicap occupés sans interruption depuis le 1er juillet 2004 dans un atelier protégé avec maintien du droit aux allocations.
Un maintien temporaire du droit aux allocations est prévu pour deux catégories :
=> Les chômeurs qui ont commencé une formation dans un métier en pénurie avant le 1er janvier 2026 et qui sont dispensés de la disponibilité pour le marché de l’emploi peuvent conserver le droit aux allocations pour la durée de la formation et pour autant que la dispense reste accordée au cours de la formation ;
=> Les travailleurs à temps partiel qui bénéficient, au moment de la fin du droit, d’une allocation de garantie de revenus peuvent conserver ce droit à l’allocation de garantie de revenus pendant la durée ininterrompue de l’occupation à temps partiel, si cette occupation est et reste au moins à mi-temps »
(Source ONEM Août 2025)
Un ou deux ans de chômage ne couvre pas le temps réel que met un chômeur, selon son âge et sa durée de chômage, pour retrouver du travail selon son secteur, ça peut être très rapide à très lent voire quasiment impossible. A cause du discours sur les pénuries, 2 ans suffiraient, et c’est la volonté du gouvernement de contraindre les chômeurs à se tourner vers ces emplois-là, en s’y formant, même s’ils ne suffiront pas à créer le plein-emploi, et pour cause, ça remettrait la pression à la hausse sur les salaires et les conditions de travail, le contraire du travail de l’Arizona qui oeuvre au saccage des droits du travail aussi. Le gouvernement n’envisage d’ailleurs pas de réintégrer tous les chômeurs dans l’emploi, il table sur un tiers seulement remis à l’emploi et un tiers qui émargerait au CPAS. Sauf que le calcul du droit à l’intégration a été revu pour englober plus de revenus des membres du « ménage » désormais et risque d’exclure beaucoup du droit résiduaire. Il est aussi prévu que le RIS soit imposable. Autant dire que le travail en noir et l’économie informelle risque de prendre un essort jamais égalé, sans grand risque pour les patrons fraudeurs sociaux qu’on ne traque pas vraiment ardemment.
Les droits de l’Homme contre les droits de l’homme d’affaires
Le chômeur un pourri seul responsable de son absence d’emploi
Le 21 janvier 2025, Georges-Louis Bouchez et consorts publiaient une proposition de loi, une première version de la limitation à deux ans du droit au chômage et sa dégressivité (un an pour l’allocation d’insertion). Les objectifs décrits dans la loi sont clairs : forcer les privés d’emploi à l’insu de leur plein gré à s’engouffrer dans des formations (courtes) pour les métiers en pénurie ou à retrouver un emploi précaire rapidement (la majorité des emplois offerts en Wallonie sont des intérims).
« La limitation dans le temps des allocations de chômage
et la dégressivité de celles-ci doivent inciter les
demandeurs d’emploi à se former et à se reconvertir
professionnellement plus rapidement et de manière plus
effective. En sachant que le soutien financier ne sera pas
permanent, les demandeurs d’emploi seront encouragés
à investir dans leur propre développement en acquérant
de nouvelles compétences et en se formant dans des
domaines porteurs. Cela permet donc d’améliorer leur
employabilité et leurs chances de trouver un emploi
durable à long terme.«
Georges-Louis Bouchez (MR)
Florence Reuter (MR)
Denis Ducarme (MR)
Benoît Piedboeuf (MR)
DOC 56 0675/001 La Chambre 21 janvier 2025

Le fait de limiter dans le temps les allocations de chômage met la pression sur les chômeurs à accepter n’importe quel emploi, à n’importe quel salaire et conditions de travail, en particulier les emplois dits en pénurie qui ne trouveraient pas preneurs parce que le chômeur préfère, selon la droite, se vautrer dans l’assistanat plutôt que travailler. La réalité est plus pragmatique : les travailleurs font leur budget et mesure les désavantages pléthoriques de ces emplois-là, dont les salaires et les conditions de travail, des métiers en pénurie parce qu’inattractifs. Ils ne sont pas en outre des emplois durables. Il ne restait donc au patronat qu’à demander aux gouvernement qu’on oblige les chômeurs par tous les moyens à prendre ces jobs de merde. Limiter le chômage à deux ans tout en durcissant la dégressivité de l’allocation devrait exercer suffisamment de pression pour y arriver.
Vu le délai très court pour se retourner (2 ans, – maximum -, ou 1 ans en allocation d’insertion) et réintégrer l’emploi, pas question pour le chômeur d’entreprendre une formation de longue durée d’un métier en pénurie, seules les formations de courte durée en pénurie du Forem/Actiris/VDAB sont ici visées. Une exception existe pour les études d’infirmier et d’aide-soignant sauf qu’elle a été recalée par le Conseil d’État comme discrimination par rapport aux autres formations à des métiers en pénurie. D’expérience Chômeuse Profiteuse explique dans son recours gagnant contre la dégressivité à quel point il est difficile de retrouver un job après plus de six mois au chômage. Elle raconte aussi comment, pendant qu’elle avait un emploi précaire, elle cherchait le suivant toute la durée de cet emploi (souvent un an). Les recruteurs préfèrent les travailleurs qui quittent un emploi à un chômeur.

Vouloir contraindre les chômeurs à occuper des emplois dits en pénurie est une violation de l’article 23 de la Constitution qui garantit « le droit au travail et au libre choix d’une activité professionnelle ». Le reste de la Loi-Programme vise à réduire ou abolir la jouissance des autres droits aussi.
Une réforme flamingande
Politiquement, cette réforme est une réforme communautaire, Bart de Wever, notre Premier, ne dit rien d’autre et les Flamands en sont convaincus, une victoire pour la Flandre et surtout la création d’un vivier de chômeurs sous pression pour renflouer les pénuries au nord du pays. La réforme touchera moins durement la Flandre qui connaît un marché de l’emploi plus dynamique.

Mais aussi parce le Premier a mis en place des exceptions à la limitation à deux ans pour certains secteurs uniquement flamands : les travailleurs des ports et les pêcheurs de mer, les débardeurs et les trieurs de poissons.
« En 2022, sur les quelque 120.000 emplois directs pourvus par l’économie portuaire en Belgique, plus de 100.000 le sont dans les ports flamands d’Anvers (près de 70.000), de Gand (30.000), de Zeebruges (10.000) et d’Ostende (5.000). Quant aux 300 à 400 pêcheurs de mer, ils travaillent sans doute tous en Flandre. »(source Sudinfo 23/07/2025).
Les artistes épargnés – jusqu’à quand ?
Les chômeurs reconnus par l’ONEM comme bénéficiant du « statut de l’artiste » ont été épargnés par la réforme mais il semblerait qu’ils restent dans le collimateur de David Clarinval (MR), le ministre de l’emploi, d’autant plus qu’une véritable croisade contre la Culture subsidiée par les pouvoirs publics a été lancée par Georges-Louis Bouchez, suivi par une enthousiaste Jacqueline Galant, ministre de tutelle, parce que les artistes soutenus seraient majoritairement de gauche et surtout critiques du pouvoir. Les artistes sont en réalité des chômeurs précaires qui conservent leur niveau d’allocation sans que leur soit appliquée la dégressivité. Ce n’est pas un vrai statut mais bien une exception dans la législation chômage. Cette exception devrait être généralisée car désormais tous les chômeurs connaissent la précarité et la succession de contrats relativement courts. La dégressivité devrait être abrogée pour tous, elle a surtout servi à affamer et punir les privés d’emploi involontaires et ainsi creuser le différentiel entre le salaire et le chômage, en défaveur du salaire évidemment.
Le CPAS ou le néant !
Cette réforme qui limite à deux ans les allocations de chômage conduira à renvoyer une partie des privés d’allocations vers les CPAS gérés par les communes. Elle vise à ruiner les finances locales et régionales de la Wallonie et Bruxelles surtout, et clairement à engluer plus encore les Francophones dans une économie en récession. En créant une misère galopante dans la partie francophone du pays (en cela bien aidée par les partis francophones de droite), la Flandre va faire du sud du pays sa « bitch ». La prochaine réforme de l’État qu’elle demandera aux Francophones, déjà à genoux, sera facile à négocier : un transfert de fric de la Flandre, prospère elle, vers la Wallonie et Bruxelles suffira à faire avaler toutes les couleuvres communautaires.
« La réforme du chômage renforce les incitants à l’emploi, mais elle pourrait également conduire certains publics à sortir des radars et ainsi de ne plus bénéficier des actions d’activation. Les réformes des systèmes de pensions et d’incapacité de travail devraient aussi stimuler l’emploi, mais avec des effets plus progressifs et à plus long terme ». (Conseil supérieur de l’emploi, juillet 2025). Sortir des radars et rentrer dans l’économie informelle souterraine ?
La droite : des ingénieurs qui boostent l’économie – quoique !
Souvenez-vous, quand la Grèce a plongé, son économie s’est effondrée alors que son peuple affamé, comme va l’être le sud du pays, était prêt à travailler quasi gratuitement.
« Notre économie subit un ralentissement », c’est le Conseil supérieur de l’emploi, un organe composé de nombreux chercheurs universitaires, dont le Ministre de l’Emploi David Clarinval (MR) en occupe d’ailleurs la présidence.
« En 2024, la création d’emplois a nettement ralenti, marquant une rupture avec la forte dynamique observée entre 2021 et 2023. » (source Rapport du Conseil supérieur de l’emploi, juillet 2025). Le Bureau du Plan ne dit rien d’autre : la limitation des allocations de chômage devrait pénaliser la croissance économique au cours des deux prochaines années car la réforme pèsera sur le budget des ménages (sic). (source L’Echo 17/07/2025).
« Au premier semestre (2025), le nombre d’emplois supprimés dans le cadre de licenciements collectifs a été à son plus haut niveau depuis plus de dix ans. » écrit l’Echo du 11/07/2025. Non seulement le nombre de travailleurs concernés est très élevé mais aussi le nombre d’entreprises. 59 entreprises ont annoncé un licenciement collectif, cela concerne 5.290 travailleurs, en plus 11.079 emplois ont été perdu pour cause de faillite durant les cinq premiers mois de l’année. (L’Echo 11/07/2025).
L’actualité depuis les élections de la droite extrémiste en juin 2024 n’a cessé d’égrener des pertes d’emploi et des faillites, des traumatismes économiques pour des milliers de travailleurs qui de surcroît se retrouveront avec seulement deux ans de chômage pour rebondir alors que souvent, ces travailleurs ont de longue carrière et un âge impopulaire chez les recruteurs, surtout en intérim.

« De manière générale, l’intérim classique au premier trimestre 2025 se caractérise par une très légère baisse tant du nombre de postes de travail que du volume de travail en équivalents temps plein par rapport à la même période en 2024. Concrètement, le nombre de postes de travail a diminué de 0,3%. Le volume de travail en équivalents temps plein a reculé de 1,3%.« (source Analyse du marché du travail pour le premier trimestre 2025, ONSS).
Devinez quel secteur a explosé littéralement en intérim ?
Les flexi-jobs ! Ces emplois à temps partiel avec un salaire brut raboté des cotisations à la sécurité sociale (le rêve patronal) qui complètent les revenus salariés où on cotise pleinement à la sécu. Les flexi-jobs, premiers concurrents des chômeurs qui sont exclus de la mesure vu qu’il faut être un travailleur à temps partiel au minimum pour y avoir droit, risque de torpiller la création d’emploi avec cotisations complètes à la sécu. Sans oublier la concurrence du travail des étudiants dont on ne s’étonne plus du taux d’échec élevé aux études supérieures.
« Ainsi, dans le commerce de détail, le nombre de postes de travail a augmenté de 19,3% et le volume de travail de 36,6%. Le secteur de l’Horeca a connu une très légère hausse du nombre de postes de travail (+0,7%) mais une forte augmentation du volume de travail, de 20,5%. »%.« (source Analyse du marché du travail pour le premier trimestre 2025, ONSS).

Selon le Comité de monitoring, l’objectif officiel de réduction de la dette rebattue par le gouvernement Arizona pour justifier toutes les mesures antisociales ne sera pas atteint, ce sera même pire, le comité de monitoring table sur une aggravation du déficit à moyen terme, jusqu’à dépasser 120% du PIB en 2030. (source L’Echo 10/07/2025). Ici l’argument budgétaire de résorption de la dette s’effondre pour l’Arizona.
Même l’agence de notation Fitch a désavoué les réformes de l’Arizona en dégradant la note de la Belgique à A+. (source L’Echo 13/06/2025)
Et comment se porte les entreprises ?
Selon STATBEL en juin 2025, « Le chiffre d’affaires des entreprises belges, à l’exception des secteurs agricole et financier, s’élevait à 405,6 milliards d’euros au premier trimestre 2025, soit une hausse de 2,1% par rapport à la même période un an plus tôt.
Dans la plupart des secteurs économiques suivis dans cette statistique, on enregistre des hausses du chiffre d’affaires au premier trimestre 2025 par rapport à la même période de 2024. Les plus fortes hausses du chiffre d’affaires sont enregistrées dans les secteurs « F Construction » (+8,5%), «D Production et distribution d’électricité, de gaz, de vapeur et d’air conditionné » (+8,1%) et « J Information et communication » (+6,9%). Le chiffre d’affaires a baissé dans trois secteurs. Par ordre d’importance en termes de chiffre d’affaires, il s’agit des secteurs « C Industrie manufacturière » (-0,4%), « R Arts, spectacles et activités récréatives » (-2,8%) et « B Industries extractives » (-11,9%). »
Désormais une bonne moitié des travailleurs belges ne sait plus boucler les fins de mois parce que le salaire est trop faible et que nous connaissons une période d’inflation galopante. Cette grogne des travailleurs a d’ailleurs contribué largement à la victoire des droites populistes et extrémistes aux dernières élections grâce au slogan sur les 500 euros/450 de plus que le chômeur qu’obtiendrait en votant MR ou Les Engagés, le salarié.
Une étude de l’Université d’Anvers démontre pourtant que le différentiel de 500 euros entre revenu de l’inactivité et du travail existait déjà avant l’élection mais le travailleur ignorant a voté pour sortir de sa misère en n’ayant aucun scrupule à jeter les chômeurs hors de la sécu. Par dégoût du clientélisme et de l’affairisme politique, le citoyen a mis tous les politiciens dans le même sac en les rejetant et en refusant de s’informer de la chose publique qui pourtant impacte lourdement son niveau de vie.
La classe politique de droite nous inflige un sinistre spectacle de fausses informations brandies en étendard par des partis jadis respectables (quoique). Toutes les outrances sont désormais permises, surtout au MR par son président Georges-Louis Bouchez, du moment qu’elles séduisent et augmentent ses adhérents. Ceux qui ont cru en leurs promesses de campagne, les déjà pauvres, et comme soeur Anne ne voient rien venir, que du contraire, s’en mordront les doigts.
Notre système parlementaire est en faillite et les droites extrémistes ont réussi avec leur populisme, des slogans simplissimes, à canalyser cette colère du peuple appauvri (par les précédants gouvernements) en leur mentant éhontément. Aujourd’hui, c’est l’Arizona le plus grand danger de la démocratie, et notamment le président du MR, Georges-Louis Bouchez qui va jusqu’à vouloir mettre au pas les journalistes de la RTBF, les journalistes du service public sont régulièrement la cible de son ire au point que sa dernière joute verbale a été enregistrée par la RTBF et a fuité. Les citoyens qui ont voté MR doivent prendre conscience de la tentation Trumpiste du président du MR qui à l’instar de Trump aux USA à fait rentrer l’extrême-droite dans son sérail et tend vers l’autocratie : le non respect de la séparation des pouvoirs et à terme s’arroger tous les pouvoirs pour mettre fin à l’Etat de droit.
Il est faux de dire que le chômeur gagne plus au chômage qu’en travaillant
L’excellent papier de la RTBF dans sa rubrique décrypte a fait les bons comptes :



Effectivement on a intérêt à travailler, sauf à temps partiel où le complément qu’on perçoit ou pas joue énormément sur le niveau de paupérisation.
Les chômeurs vont perdre beaucoup plus que ce qui est lié au durcissement de la dégressivité. L’Arizona supprime l’avantage de la réduction d’impôt appliqué au chômeur. Les jours chômés ne seront plus des jours assimilés pour la pension comme par le passé, ils donneront droit à un salaire fictif limité, sans oublier la suppression de l’enveloppe « bien-être » qui permettait un rattrapage des allocations sociales, surtout des pensions.
La droite, ces ingénieurs qui boostent la création d’emploi – quoique !
Comme d’habitude, aucune obligation du côté du patronat de créer les emplois, il prétend qu’ils sont déjà pléthoriques à chercher preneur. C’est évidemment faux. Sans compter la durée des contrats de travail offerts pour ces emplois vacants. Les pénuries d’emploi clamées par le patronat sont d’autant plus relatives que les contrats offerts ne sont pas durables. La précarité, elle-aussi, est le fruit de la sape des CDI orchestrée par les patrons francophones surtout. Il faudrait une révolution des mentalités patronales au sud du pays pour que tous les privés d’emploi involontaires retrouvent un emploi. Alors on atteindrait un plein-emploi et une prospérité accrue des travailleurs. La seule prospérité visée par l’Arizona est celles des grandes entreprises et des PME.
« En 2024, la création nette de postes de travail s’est limitée à 16.500 unités. Bien loin des 96.000 jobs de 2022 et des 40.000 de 2023. Le constat est posé par le Conseil supérieur de l’emploi (CSE) dans son rapport annuel. « C’est un chiffre trois fois inférieur à la moyenne historique », constate Geoffrey Minne (Banque nationale de Belgique). » (Le Soir 12/07/2025)
Les Francophones sont les plus touchés par le chômage de masse de deux ans et plus :
49% des Wallons au chômage (source Forem) et
25 % des sans emploi ont 50 ans et plus en Wallonie.
Les offres d’emploi du Forem en juillet ( et aussi sur une année) sont loin de suffire à résorber le chômage, et surtout l’inadéquation persistante des profils disponibles et de ceux recherchés est un frein majeur à l’intégration dans l’emploi des chômeurs.

Fin juillet 2025, la Région bruxelloise comptait
94.191 privés d’emploi inoccupés (DEI) dont 52.049 (-2,1%) chômeurs indemnisés.
A Bruxelles, « le seul groupe qui croît depuis 10 ans est celui des 50 ans et plus. Ceci est dû en partie à la fin de la dispense d’inscription progressivement jusque 60 ans, qui est en lien avec l’allongement de l’âge à la pension. Depuis l’été 2021, leur nombre commence cependant à diminuer légèrement. » Ils représentent 25,4% des sans emploi bruxellois (Source Actiris juillet 2025).
Une exemption de la fin de droit au chômage a été instituée dans la loi-programme pour les plus de 55 ans qui comptent 30 ans de carrière, mais la durée de carrière augmente annuellement d’un an pour atteindre 35 ans en 2030. Cela représentera donc une portion congrue des cinquantenaires, majoritairement des hommes vu le problème bien connu des carrières des femmes en Belgique.
Selon les chiffres fourni par David Clarinval suite à une question parlementaire d’un député NVA : en janvier prochain, 49.197 Belges de plus de 55 ans perdront leur allocation de chômage, car ils ne comptabilisent pas au moins 30 ans de carrière. Parmi eux, six sur dix n’ont plus travaillé depuis plus de cinq ans, un sur trois perçoit des allocations de chômage depuis plus de dix ans ( soit 16.399) et un sur douze, soit 4.354 personnes, touche des allocations depuis plus de 20 ans. (source Belga 5/08/2025)
Chez ces 4.354 personnes, on découvrirait, en cherchant plus loin, qu’ils ont probablement connu des problèmes de santé, accidents, accidents du travail ou ont des limitations et inaptitude à 33% de l’ONEM.
L’enlisement dans le chômage n’est pas le fait du chômeur, ce sont les recruteurs qui ne veulent pas d’un chômeur de longue durée même expérimenté, Chômeuse Profiteuse en témoigne d’ailleurs dans journalduneprofiteuse.be.
Les chômeurs sanctionnés ne sont pas légions
Des sanctions fédérales et régionales existent et elles démontrent un durcissement des sanctions en 2024 (source rapport Onem vol.2 2024).
L’ONEM a sanctionné pour chômage volontaire 21.286 chômeurs,
la majorité, 80%, soit 16.908 personnes pour abandon d’emploi (dont 6.532 Wallons, 2.379 Bruxellois).
Pour refus d’emploi 392 chômeurs ont été sanctionné par les Régions.
Elles ont aussi sévis dans le cadre de :
– la non-présentation auprès d’un employeur : 913 (+7,3% par rapport à 2023) et
– la non-présentation au service de l’emploi ou de la formation 10.719 (+3,9%) soit 2.190 Wallons et 87 Bruxellois.
On est loin de la généralisation abusive que les chômeurs ne veulent pas travailler, ne se présentent pas au rendez-vous côté francophone.

David Clarinval (MR), ministre fédéral de l’emploi a fustigé le manque de contrôle des chômeurs d’Actiris (service de l’emploi de Bruxelles). « Bernard Clerfayt (DEFI), son homologue du côté de la Région bruxelloise juge ces propos « excessifs » et « grossiers ». Selon le ministre bruxellois, Actiris fait sa part. « 30 % des chômeurs sont contrôlés. Dire qu’on ne fait rien est faux. Nous ne contrôlons pas assez, c’est vrai. Nous aimerions atteindre 90 % ». Il rappelle par ailleurs qu’il a lui-même tenté de réformer les procédures de contrôle lors de la précédente législature. « J’ai mis le débat au gouvernement bruxellois. Mes partenaires de la majorité (PS, Ecolo… NDLR) ont bloqué. Il y a eu aussi un blocage au sein d’Actiris entre patronat et syndicat ». (Sudinfo 25/06/2025)
Le droit au rebond – une fausse bonne idée
Le droit de démissionner et de toucher le chômage pendant 6 mois, si on compte une carrière de 10 ans de travail, semble une bonne idée sauf que c’est surtout la réponse du gouvernement Arizona à un problème de société : le harcèlement et les personnes en burn-out. Au lieu de s’attaquer aux causes du mal, l’Arizona donne une échappatoire au travailleur, pas tous, et épargne ainsi le paiement du préavis au patronat. On ne guérit pas d’un burn-out si on se soigne en 6 mois, pas plus qu’on ne se recase dans l’emploi en 6 mois non plus. Aucune réorientation professionnelle ne prendra que 6 mois si on veut changer de métier. Ce sera donc plus fréquemment utilisé pour pousser à partir les personnes en souffrance au travail, qui affaiblient, craqueront et donneront leur démission.
Les patrons ne veulent pas former eux-mêmes les chômeurs
En outre, le patronat s’est toujours farouchement battu contre l’instauration d’obligation légale de jours de formation de son personnel car il veut en laisser ce « privilège » aux services publics, payés par nos impôts.
C’est pratique car le patronat cogère avec les syndicats le Forem/Actiris qui est l’organisme régional en charge de la formation des privés d’emploi, avec ou sans allocation de chômage, mais aussi du contrôle des chômeurs bénéficiaires d’allocation.
Le Forem se plie aux demandes de formation des patrons selon les secteurs et ainsi remet une infime portion des chômeurs dans l’emploi. Le Forem, pourtant service public, se met au diapason des desiderata patronaux, se permet de discriminer et de reléguer comme le fait le recruteur du secteur de l’intérim, un jeune vingtenaire aux dents longues dont c’est le premier emploi et qui n’a que faire de la lutte contre les discriminations inscrites dans la loi Moureaux. La difficile charge de la preuve qui incombe au candidat malheureux rend quasi impossible les condamnations des recruteurs qui discriminent. Ce sont les statistiques qui souvent dévoilent ces discriminations, ainsi que les témoignages de victimes, ce qu’aucun politicien n’ignore mais qu’aucun ne combat non plus ardemment. Il faut laisser le patronat libre de choisir ses travailleurs même si c’est injustement.
Des pénuries d’emploi – quoique !
La relativité de la pénurie d’emploi tient au fait que les patrons veulent la crème de la crème (sans devoir les former) et rejettent ce qui représentent la plus grande part des chômeurs wallons, les moins qualifiés (41 % sont au plus diplômés de l’enseignement secondaire du 2ème degré – Source Forem Juin 2025) et les plus exclus du marché de l’emploi (49 % sont au chômage depuis deux ans et plus).

« Le taux de chômage de la capitale s’explique en grande partie par le manque de qualification des chercheurs d’emploi. « Il y a actuellement 89.931 chômeurs à Bruxelles », explique le porte-parole d’Actiris, Romain Adam. « Environ 55.000 d’entre eux ont un niveau d’études faible ou alors sont des étrangers sans équivalence de diplôme ». Or, le marché de l’emploi bruxellois est « principalement orienté vers l’économie tertiaire, donc les services, avec des employeurs qui cherchent des employés hautement qualifiés, c’est-à-dire des bacheliers ou masters », poursuit-il. « Le marché de l’emploi doit s’adapter à la réalité de notre région ». »
L’inadéquation entre le profil recherché par l’employeur et les profils des chômeurs disponibles a été maintes fois exposée dans les rapports du Forem wallon/Actiris au cours des dernières décennies. Ca découle directement du problème de la relégation des élèves dans l’enseignement.
Les Forem, Actiris ne sont pas en capacité de former et réintégrer à l’emploi les plus exclus car pour faire du chiffre dans ses rapports annuels, ils préfèrent choisir le haut du panier des privés d’emploi, les reformer alors qu’ils sont déjà qualifiés dans des formations où l’emploi est garanti car c’est le patronat qui a commandité la formation (en règle générale 12 personnes à 15 personnes par formation). Mais même une formation demandée par le patronat ne garantit pas une insertion durable dans l’emploi de tous les participants. Pour les organismes régionaux de l’emploi, un jour d’intérim suffit à compter pour l’insertion dans l’emploi dans l’évaluation juste en fin de formation. Ce n’est pas une insertion durable.

Aucun parti politique ne s’est réellement attelé à cet écueil de l’inadéquation des profils recherchés et des profils disponibles. Personne n’est inemployable dans une société inclusive. Si au lieu de partir des desiderata du patronat, on démarrait des besoins sociaux et écologiques non couverts et des compétences réelles et des envies des privés d’emploi les plus exclus, c’est en partie le concept à la base de « territoires zéro chômeur » (concept importé de France par le PS en Wallonie et à Bruxelles), on arriverait à combler énormément de besoins locaux, tout en s’inscrivant dans la transition écologique. Beaucoup de ces emplois seraient des services rendus à la collectivité, dignes de devenir des emplois publics à terme, vu que c’est de l’argent public qui les finance.
Le chômage et sa dégressivité portent un lourd tribu dans la dégringolade des salaires depuis 2012. En effet, depuis lors le pouvoir d’achat des travailleurs n’a cessé de diminuer. Le patronat se retranche systématiquement derrière la loi du 26 juillet 1996 relative à la promotion de l’emploi et à la sauvegarde préventive de la compétitivité, pour bloquer toute évolution à la hausse des salaires. L’Arizona a fait en sorte de garantir une perte de revenu aux chômeurs qui reprennent le travail car désormais un emploi convenable équivaut à 90% du revenu perçu en comptant les allocations familiales du salarié et les frais de transport. Ca fera s’effondrer légalement tout pouvoir du privé d’emploi dans la négociation salariale au moment de son embauche. L’Arizona veut s’assurer que le chômeur, terrifié par la fin de droit, se recycle dans l’emploi en pénurie et accepte toutes les conditions de travail et de salaires voire de mobilité sans broncher. La mobilité a d’ailleurs été identifiée comme un frein majeur à la réintégration dans l’emploi en Wallonie, surtout si on veut envoyer des chômeurs en Flandre.
Le but du chômage c’est de toute façon de faire perdre au candidat sa valeur marchande : une fois chômeur ont perd souvent au moins 30% de sont dernier salaire, quand on a moins de 6 mois de chômage. En intérim, il n’y a aucune marge de négociation salariale. Non seulement le travailleur ne peut pas discuter le salaire mais il ne peut pas prendre ses congés annuels à sa guise, vu les remplacements pendant l’été, les intérims n’hésitent pas à mettre dans l’offre d’emploi que les vacances ne pourront pas être prises. En outre, les contrats ne sont pas conformes à la législation sur le contrat de travail et comme tout est électronique maintenant, il suffirait de donner le pouvoir à l’inspection du travail (SPF Emploi – direction des lois sociales) de vérifier les contrats électroniques des intérims pour tout mettre en règle. Malheureusement, le législateur n’a pas donné ce pouvoir à l’inspection du travail. Il faut amener son contrat personnellement à l’inspection et demander de le vérifier. La fraude sociale patronale n’est pas, et depuis longtemps, une priorité gouvernementale, elle est tolérée, comme l’économie informelle croissante. Laissez faire du travail au noir est une façon de calmer les révoltes sociales.
La cotisation patronale fait partie du salaire brut !
Non contents de ça, les partis de droite extrémistes poursuivent sans relâche la fin de la cotisation sociale afin de tuer définitivement la sécurité sociale, car elle leur coûte et donne encore un libre choix relatif de l’emploi qu’on recherche et accepte. Des réductions/suppressions de cotisations sociales pour l’employeur vont siphonner le budget de la sécurité sociale.L’argument de la droite alors sera « il n’y a plus d’argent pour financer la sécu, donc exit » or ce sont eux qui ont rendus aux patrons la cotisation sociale du salaire brut.
Le discours sur la cotisation patronale qui est un coût pour l’employeur dont il veut se débarrasser est en fait une atteinte virulente du salaire brut du travailleur. Il n’y a pas de cotisation sociale patronale qui tienne, il y a un salaire brut payé au travailleur. Rogner les cotisations sociales patronales, part de l’employeur dans le salaire de son travailleur, c’est voler au travailleur le salaire total auquel il a droit. D’où l’invention des flexi-jobs, ce système idéal pour le patronat qui est vu par beaucoup comme génial, y compris par les travailleurs appauvris qui cumulent deux jobs pour boucler les fins de mois, alors qu’ils participent à amputer le salaire brut de cette conquête qu’est la cotisation à la sécurité sociale. Même s’il faut un 4/5ème salarié « normal » où on cotise plein pot à la sécu, ce système est désormais devenu le pis-aller des travailleurs et des pensionnés qui ne gagnent pas assez pour vivre bien.
La précarité des chercheurs d’emploi est généralisée
La précarité s’est installée pour les privés d’emploi qui décrochent au mieux des intérims (contrats majoritairement offerts, avant les CDI selon le Forem) voire des CDD (il y a généralisation des CDD à répétition avant un CDI depuis qu’on a supprimé la période d’essai du contrat de travail et comme les patrons sont des girouettes, elle sera réintroduite par l’Arizona).
« A la fin du mois de juin 2025, la Wallonie comptait 248.316 chercheurs d’emploi inoccupés (NDLR : avec ou sans alloc), Communauté germanophone comprise. Parmi ceux-ci, 117.809 personnes, soit 47 %, perçoivent des allocations de chômage ou d’insertion.«
Les contrats de travail proposés sur la même période restent toujours majoritairement des contrats
intérimaires, suivis par les contrats à durée indéterminée :
– 56,7 % de contrats intérimaires (57.261 offres)
– 29,1 % de contrats à durée indéterminée (29.428 offres)
– 9,5 % de contrats à durée déterminée (9.623 offres)
(Source Le Forem juin 2025)
130.707 personnes qui ne perçoivent pas d’allocation de chômage/insertion cherchent un job en Wallonie ! C’est bien la preuve qu’il n’y a pas de lien de cause à effet entre percevoir le chômage et le fait de trouver du travail. Retrouver du travail est encore plus dur si la récession se profile.
Supprimer le chômage ne réintègre pas dans l’emploi.
Pour actuchomage.info, cette réforme du chômage est inconstitutionnelle et devrait être annulée par la Cour Constitutionnelle sur base d’une violation du standstill lié à l’article 23 de la Constitution. Des centaines de chômeurs ont gagné devant le Tribunal du travail ou la Cour du travail (à l’initiative de la FGTB) contre la précédente réforme du chômage orchestrée par la gouvernement Di Rupo : la dégressivité accrue des allocations de chômage et la limitation à trois ans des allocations d’insertion. Cette fois-ci, le combat juridique se mènera devant la Cour Constitutionnelle car c’est d’une loi-programme qu’il s’agit et non d’un Arrêté Royal. Les syndicats vont attaquer la réforme du chômage et des pensions en annulation avec le maigre espoir d’obtenir au mieux un moratoire de deux ans. C’est insuffisant. Il faut faire annuler la réforme du chômage de la loi-programme et toutes ses atteintes.
Même si le recours à la Cour Constitutionnelle n’a aucune garantie de succès, c’est le seul espoir démocratique d’annuler la réforme du chômage de l’Arizona, aussi mince soit-il, il faut le saisir.
Les syndicats commencent à informer sur la réforme du chômage, renseignez-vous auprès de votre syndicat pour assister à une séance d’iinformation dès septembre 2025.
Ca n’enlève rien aux luttes sociales et syndicales qui doivent s’intensifier vers une paralysie totale du pays pour contraindre le monde patronale à redistribuer les fruits de la croissance. Après des décennies de manifestations et de courtes grèves sans grandes victoires, il est temps de réellement passer à l’offensive et bloquer le pays. Empêcher le patronat de faire de l’argent est le seul langage qu’il comprend.
Pour les chômeurs belges, c’est la lutte finale !
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Spécial dédicace à ceux qui ont une personnalité de moule parquée et traînent en charentaise :