Mesure ultra-controversée qui a été décidée par le gouvernement Di Rupo lors de la précédente législature et entrait en vigueur au 1/1/2012, la fin de droit au chômage pour les privés d’emploi admis sur base des études verra l’hémorragie d’exclusions démarrer au 1/1/2015.
Même revue par le gouvernement d’alors, Di Rupo, la loi n’a subi que des modifications ténues qui ne sont qu’une goutte d’eau dans l’océan des exclusions à venir ! Les syndicats comme des groupes de chômeurs autonomes se sont organisés pour dénoncer la mesure mais elle n’a pas été abrogée, ni même suspendue vu la situation catastrophique de l’emploi en Belgique. Supprimer le droit à la Sécu est une aberration par les temps qui courent, c’est une évidence. En outre, cette législation contrevient au standstill donc est attaquable au Tribunal du Travail, ce que prévoit de faire les syndicats qui défendent les chômeurs dès 2015.
La mesure en schémas (généraliste):
Il s’agit de résumer les grandes lignes de cette législation. Comme tout ce que produit l’ONEM ces dernière années, elle laisse à penser qu’il fume la moquette, c’est hyper compliqué et inutile car il faut en arriver à du cas par cas in fine quand il s’agit de compter les jours travaillés par le chômeur endéans la période pour voir s’il donne droit à un droit additionnel (cfr. l’instruction ONEM sur Riodoc n° 141181 via ONEMTech.be du 24/10/2014) voire évaluer si son changement de situation familiale a un effet positif (dans le vrai sens du terme cette fois). Pour bien faire, le chômeur doit voir avec son organisme de paiement (syndical ou CAPAC) s’il est encore possible de retarder la fin de droit.
Mais cela ne fera effectivement que retarder l’inévitable, la seule chose qui sauve c’est un miracle, un emploi qui paie et qui dure (non, non, le patronat n’a pas l’intention de le créer !), après, toutes les formes de contestations, de révoltes, de désobéissances me paraissent appropriées, c’est vous qui voyez …
Quelques concepts-clés qui méritent une explication:
Les notions suivantes sont mentionnées dans les schémas ci-dessus:
AGR: Allocation de Garantie de Revenu est le terme officiel pour le complément de chômage des travailleuses (surtout) à temps partiel qui acceptent un emploi à temps partiel tout en souhaitant travailler à temps plein. Ce complément fera l’objet d’une diminution car le gouvernement Michel a prévu de le rétrograder au calcul de 2008, beaucoup moins avantageux pour le travailleur à temps partiel qui peut aller jusqu’à perdre la moitié du montant actuel selon les syndicats (à confirmer quand la mesure sera loi).
« Sauver » pour 2 ans ?
L’article 63, § 2, alinéa 4, 4° de l’A.R. du 25/11/1991 portant réglementation du chômage prévoit que le droit aux allocations d’insertion (limité en principe à une période de trois ans, éventuellement prolongée) peut être prolongé, une seule fois, d’une période supplémentaire de deux ans si l’allocataire d’insertion:
justifie d’une inaptitude permanente au travail de 33 % au moins, reconnue par le médecin agréé de l’ONEM
et
collabore positivement à un trajet d’accompagnement adapté (à son état de santé), organisé ou reconnu par le service régional de l’emploi compétent.
Les deux conditions précitées doivent être réunies au moment de l’expiration du droit aux allocations d’insertion. (source :Riodoc n° 141493/1 via ONEMTech du 25/11/2014)
MMPP : une classification interne aux organismes régionaux de l’emploi qui place les chômeurs dans des catégories selon leur « état » évalué subjectivement par un conseiller-emploi appelé en jargon « conseiller-référent ». Le chômeur MMPP est une personne qui est « diagnostiquée » (sic) par le conseiller-référent comme « présentant de graves problèmes aigus ou chroniques, d’ordre médical, psychique ou psychiatrique, éventuellement combinés avec des problèmes sociaux » (définition ONEM). La procédure veut qu’un(e) assistant(e) social(e) du service régional de l’emploi prenne en charge le chômeur ce qui l’immunise pendant 2 ans du contrôle dispo et de la fin de droit si c’est un chômeur en allocation d’insertion. Pour mieux comprendre les dangers de ce « diagnostic » stigmatisant le chômeur, lire l’excellent texte : Médicaliser pour mieux exclure de Frédérique Van Leuven, psychiatre :
Une nouvelle pratique du FOREM wallon tend à établir une catégorie de travaiileurs sans emploi – les personnes affectées de troubles Médicaux, Mentaux, Psychologiques ou Psychiatriques – non-insérables ou réinsérables dans le circuit du travail. Cette réponse inadéquate à un réel problème de réinsertion participe, quelles que soient les volontés conscientes du FOREM, d’un processus de stigmatisation et de psychiatrisation de la misère sociale.
Inaptitude au travail de 33% : un médecin agréé par l’ONEM reconnaît une inaptitude au travail fixée à 33% qui permet soit d’échapper au contrôle dispo soit d’avoir droit à la « sympathie » (sic) du facilitateur du contrôle dispo … L’ONEM a sorti une instruction qui informe que si la fin de droit est déjà atteinte, il n’est plus possible de faire valoir les 33%, donc si vous voulez en bénéficier, il ne faut pas tarder et aller à votre organisme de paiement pour faire la demande d’examen par un médecin agréé. Il risque d’y avoir foule …
Contrôle dispo: l’innommable machine à exclure sous le fallacieux prétexte de vérifier la recherche d’emploi des chômeurs indemnisés par l’ONEM en pleine pénurie d’emploi aggravée (le contrôle existe aussi dans sa version CPAS tout aussi abominable).
A noter qu’à la suite de la 6e réforme de l’Etat, la compétence de l’organisation du contrôle dispo dans ses 3 formules (pour chômeurs admis sur base du travail, pour chômeurs admis sur base des études percevant des allocations d’insertion, pour chômeurs admis sur base des études encore sans allocation durant le stage d’insertion professionnelle d’un an minimum) est transférée aux Régions et donc respectivement au Forem en Wallonie, ADG en Communauté germanophone, à Actiris à Bruxelles et au VDAB en Flandre.
Malheureusement, tant que les syndicats négocient dans les Régions, peu de choses filtrent, même si l’initiative moyennement louable a été prise par Actiris, suivi du Forem, de proposer de « sauver » les chômeurs potentiellement exclus pendant deux ans en les casant dans un statut extrêmement grave voire controversé de MMPP. On n’est plus à une contradiction près dans la sphère sociale où l’injonction paradoxale domine le discours comme les pratiques. Que deviennent le droit à la citoyenneté, à l’autonomie et l’égalité des droits dans un système pareil, où on demande la soumission à des diktats qui contreviennent aux droits de l’Homme de base du chômeur à commencer par celui de choisir librement son travail comme de bénéficier d’une protection sociale ?!
Décision ONEM par courrier à la mi-janvier 2015
La confirmation de la fin de droit sera envoyée par l’ONEM aux chômeurs concernés à la mi janvier 2015, et les mois suivants car on ne fait que commencer en janvier 2015. Cette lettre est très importante car la date de la notification de la décision « positive » (sic) en jargon de l’ONEM peut vous servir à introduire un recours au Tribunal du Travail, endéans les 3 mois, ce recours pourra se fonder sur le standstill inscrit dans la Constitution belge (comme pour la dégressivité).
Si nos gouvernements choisissent l’illégalité et font voter par un Parlement, aux ordres, des lois inconstitutionnelles, il faut les attaquer n’est-ce pas ?
Corine Barella
Lire aussi le point avec Daniel Richard, FGTB Verviers sur la fin de droit au chômage qui débute en 2015
Schémas de la mesure : source fiche info ONEM T35 du 03/12/2014
La plateforme francophone de lutte contre la fin de droit:
RT @actuchomageBE: Schémas de la fin de droit au chômage en allocation d’insertion et de ce qui retarde l’issue #ONEM #Forem #Actiris http:…
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